Une exposition dans le cadre de célébrations controversées
L'exposition Napoléon vient de se terminer. Depuis quelques semaines celle-ci était en place dans le "parc Chopin" baptisé cours Napoléon Bonaparte par Bruno Beschizza qui s'avoue être un admirateur de l'empeureur. La polémique sur la célébration de Napoléon à Aulnay a déjà provoqué une contre manifestation et des justifications du cabinet du maire suite à l’annulation du défilé militaire à l'honneur de l'ancien dictateur corse qui a rétabli l'esclavage en 1802.
A noter, un gardien semble avoir été spécialement payé pour garder toute la journée et le soir, la douzaine de panneaux de l'exposition que notre blog a archivé ici :
Que dit l'exposition sur le rétablissement de l'esclavage par Napoléon?
On comprend ici que cette exposition a été réalisée par le service de communication de la ville, plus habitué à la propagande dans Oxygène qu'à la rigueur des faits historiques.
L'expo cache la "faute" dont pourtant Napoléon se repentait
Même l'ancien empereur reconnaissais dans ses mémoires écrites à Saint Hélène, pourtant particulièrement flatteuses envers lui-même, que le rétablissement de l'esclavage était une tâche dans sa postérité, une faute pour laquelle il exprimait l'un de ses seuls regrets. Loin d'exposer l'aspect dramatique de ce reniement, l'exposition tente d'en diminuer la responsabilité en passant sous silence la répression violente provoquant des milliers de morts que lance Bonaparte pour obtenir ce retour du travail forcé des noirs. Le texte minimise aussi la portée de l'abolition de 1794 par la révolution (qui est qualifiée d'abolition "en théorie" et "exceptionnelle pour l'époque"). Pourtant cette abolition était loin d'être théorique car Napoléon a dû mobiliser les deux tiers de la flotte française et des dizaines de milliers d'hommes pour obtenir par la force le retour de l'esclavage en 1802.
À la Guadeloupe et Saint-Domingue, ce rétablissement s'effectue par la force, via trois expéditions, dont deux à Saint-Domingue, mobilisant deux tiers de la flotte française et plusieurs dizaines de milliers de militaires. La résistance armée des ex-esclaves est ainsi vaincue à la Guadeloupe après plusieurs milliers de morts mais victorieuse à Saint-Domingue, où vivait près de la moitié des esclaves français, et qui devient en 1804 Haïti, deuxième ex-colonie indépendante, après les USA. La France fut pour sa part le seul pays au monde à rétablir l’esclavage dans toutes ses colonies, huit ans après avoir voté son abolition, également dans toutes ses colonies.
Source page Wikipédia sur le rétablissement de l'esclavage.
Une exposition négationniste ?
Depuis la 2001 l'esclavage est reconnu par la France comme un crime contre l'humanité. Dans ce contexte, le rédacteur de cet article - qui n'est pas historien - se pose la question du négationnisme au regard de sa définition : démarche de falsification historique qui consiste à de nier ou minimiser un crime contre l'humanité.
Le texte de l'exposition semble bien constituer une minimisation de l'action de Napoléon dans la mise en œuvre de ce crime contre l'humanité. La question qui se pose alors est de savoir si cette minimisation est grossière pour constituer un acte de négationnisme. Nous laisserons le lecteur et surtout les historiens juger.
3 Réponses à “L’expo Napoléon était-elle une falsification historique ?”
M Suaudeau, vous avez sans doute bien étudié cette période avant d’écrire votre article.
Comme vous le dite, Napoléon semble avoir regretté sa décision de 1802 en ….1815.
Par contre avez vous l’information du nombre de personnes qui ont souffert de la « traite » entre 1802 et 1848 ?
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Il est toujours difficile de commenter l’histoire à l’aune des outils et paradigmes d’aujourd’hui!
Quelques précisions: la traite négrière décrit le commerce d’esclaves africains, quand l’esclavage décrit l’asservissement de personnes.
La fameuse loi de 2001 dite loi Taubira n’évoque que ce qui concerne la France et ses ancienne colonies:
« La République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du xve siècle, aux Amériques et aux Caraïbes, dans l’océan Indien et en Europe contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité. »
On considère que l’esclavage n’a été réellement et juridiquement aboli en Mauritanie qu’en 2015. Jusque là,l’esclavage mauritanien ne constituait pas un crime contre l’humanité au sens de la loi Taubira!!! Grandeur et limites des loi mémorielles.
Quand elle est transatlantique la traite consistait à déporter des africains en Amérique.
Inventée par les marchands portugais dès le XVIe siècle elle a atteint son apogée au XVIIIe. Les puissances coloniales (Angleterre, France, Portugal et Espagne l’ont abondamment pratiquée. Mais les puissances commerciales comme les Pays-Bas et le Danemark y ont également, pour leur part contribué.
La traite transatlantique (je dis bien traite, je ne dis pas esclavage) a été abolie par… Napoléon en 1815. Sous la pression de l’Angleterre qui faisait la chasse aux bateaux négriers.
En ce qui concerne les victimes de l’esclavage (@Patrice) et ou de la traite entre 1802 et 1848, les estimations des historiens sont très variables. Traite et esclavage ont certainement sur cette période fait moins de victimes que l’ensemble des guerres napoléoniennes!!! On estime entre 3 et 7 millions le nombre des victimes des guerres napoléoniennes et des guerres révolutionnaires de 1792 à 1815.
En ce qui concerne les conséquences de la traite transatlantique on parle de l’ordre de 10 millions de victimes sur 4 siècles du XVe au XIXe siècle.
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Merci @Patrice et @J.HAVEL pour vos précisions et réponses.
Oui @Patrice le repentances de Napoléon en 1815 sont bien tardives. Je dirais surtout que l’ancien Empereur exprime ses regrets au moment où il n’a plus le pouvoir, ce qui est bien plus facile car il a une bonne excuse pour ne plus se corriger.
@J. Havel
Je n’avais pas saisi la portée limitée du texte Taubira. Merci de cet apport. Ce texte s’applique tout de même à l’esclavage rétabli par Napoléon. Je rajouterais ma défiance toute personnelle dans les lois mémorielles. La loi n’a pas à affirmer les vérité historiques qui doivent être établies ou défaites par la seule communauté scientifique. Par contre la loi peu s’appuyer sur la science pour édicter des règles. En l’occurrence je crois que le texte de Taubira reste selon moi dans les clous mais j’admets que cela puisse se discuter.
Merci d’avoir remis en perspective les autres victimes Napoléoniennes.
Cela complète utilement mon article écrit par un béotien qui peut très bien se tromper et se met ici à dérailler car il parle de lui à la 3e personne 😉 .
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