Commençons par réparer une omission de taille dans une note antérieure sur la vidéosurveillance: l'Institut National des Hautes Etudes de Sécurité a publié en juillet 2008, un rapport intitulé "La vidéo protection: conditions d'efficacité et critères d'évaluation", accessible ici.
Poursuivons par des remerciements à Frank Cannarozzo, conseiller municipal UMP d'Aulnay-sous-Bois, pour les précisions apportées dans ses commentaires de cette même note, sur le mode de fonctionnement et les coûts de la vidéosurveillance dans notre ville, et à Alain Amédro, adjoint au maire d'Aulnay-sous-Bois, conseiller régional, pour nous avoir signalé l'étude de l'Institut d'Aménagement et d'Urbanisme d'Île-de-France, parue en octobre 2008, intitulée "Vidéosurveillance et espaces publics: état des lieux des évaluations menées en France et à l'étranger" et accessible ici.
"Faut-il développer la vidéosurveillance?"
La question fait débat à Aulnay-sous-Bois par-delà les clivages politiques habituels. Hervé Jouanneau a récemment réalisé un éclairant "dossier d'actu" accessible ici, pour "La Gazette.fr" des communes, départements et régions, avec cette question en titre.
Ces rapport, étude et synthèse ont fait suite à la déclaration de Michèle Alliot-Marie, Ministre de l'Intérieur, le 12 octobre 2007, dans un entretien accordé au journal "le Monde": "Je compte donc tripler le nombre de caméras en moins de trois ans, d'ici fin 2009, sur la France entière".
La "LOPSI" pour tripler le nombre de caméras par rapport à 2007
Le Conseil des Ministres du 27 mai 2009 a adopté un projet de Loi d'Orientation et de Programmation pour la Performance de la Sécurité Intérieure -accessible ici-, présenté par Michèle Alliot-Marie. Les articles 17 & 18 de ce projet de loi "aménagent le régime juridique de la vidéoprotection" -vocable plus rassurant que "vidéosurveillance"-, afin de "favoriser le plan de triplement des caméras installées sur le territoire et de renforcer les garanties de nature à assurer les respect de la vie privée des personnes filmées".
Conflit de compétences non résolu sur le contrôle de la vidéosurveillance
Ce projet de loi ne règle pourtant pas les conflits de compétences entre les préfets et la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés sur les autorisations d'installation et le fonctionnement disparate des commissions départementales de vidéosurveillance chargées de donner un avis.
En effet, la principale recommandation du rapport du Sénat "La vidéosurveillance: pour un nouvel encadrement juridique", publié le 10 décembre 2008 -et accessible ici- de réunir sous l'autorité de la CNIL les compétences d'autorisation et de contrôle en matière de vidéosurveillance, n'a pas été prise en compte.
Un p'tit sourire pour le télé-vigile!
Les articles 17 & 18 du projet de loi assouplissent le cadre juridique de la "vidéoprotection". Le visionnage des images par des personnes privées sous délégation d'une autorité publique serait désormais autorisé, l'accès aux enregistrements restant réservé aux représentants de cette dernière.
Cette mesure irait à l'encontre de l'une des recommandations des sénateurs :
2. Ne pas déléguer la vidéosurveillance de la voie publique
Lors de son audition, M. Alain Bauer, président de la commission nationale de la vidéosurveillance, s'est déclaré opposé aux projets de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur afin de permettre à des personnes privées d'assurer les missions de visionnage des images de la voie publique et d'alerte des forces de sécurité intérieure compétentes en cas de survenance d'un incident.
Il a estimé que ce type de mesure risquerait de remettre en cause la confiance du public dans la vidéosurveillance.
En outre, vos rapporteurs rappellent le principe dégagé par le juge administratif selon lequel il est impossible de déléguer une mission de police à une personne privée par un contrat.
Le Conseil d'Etat a précisé dans un arrêt de principe du 29 décembre 199742(*) que la surveillance de la voie publique relevait des pouvoirs de police du maire et qu'aucune délégation n'était possible. En l'espèce, un maire souhaitait confier à une société de surveillance et de gardiennage la surveillance de sa ville en soirée. Incidemment néanmoins, le juge administratif validait la possibilité de déléguer la surveillance et le gardiennage des installations et bâtiments publics à une société privée43(*). En effet, seule la surveillance de la voie publique proprement dite relève des pouvoirs de police du maire44(*).
Un jugement du tribunal administratif de Nice du 22 décembre 200645(*) a fait application de cette jurisprudence à la vidéosurveillance en estimant qu'il n'y avait pas de différence de nature entre la surveillance de la voie publique et la vidéosurveillance de celle-ci, ces deux missions relevant de la mission de police municipale.
Vos co-rapporteurs estiment également que la vidéosurveillance de la voie publique à des fins de police46(*) ne peut faire l'objet de délégation à des personnes privées pour les raisons exposées ci-dessus, et en raison des risques pour les libertés publiques47(*).
Au surplus, il n'apparaît pas possible que des villes puissent vendre des prestations de vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées, en particulier à des commerçants48(*).
Recommandation n° 3 - Ne pas déléguer la vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées, ni permettre aux autorités publiques de vendre des prestations de vidéosurveillance de la voie publique à des personnes privées.
Michèle, François et Gérard à Aulnay
Efficacité, évaluation, coût, contrôle de la vidéosurveillance... pardon, de la vidéoprotection... gageons que Gérard Ségura s'est entretenu de ces sujets avec Michèle Alliot-Marie, Ministre de l'Intérieur, et François Fillon, Premier Ministre, lors de leur visite du 12 juin dernier à Aulnay-sous-Bois -photos souvenir ici-, sur le thème de la sécurité.
Jean-Marc Engelvin