Amiante, Environnement, Santé

Une école primaire menacée par l’amiante

27 avril, 2005 à 11:01 | Posté par

Le site internet de Marianne propose un article sur l'ancienne usine du CMMP. Je vous livre l'article:

A Aulnay-sous-Bois (93), une ancienne usine d’amiante n’a jamais été désinfectée. Elle est pourtant située en pleine zone pavillonnaire.

« Ivan, mort à 65 ans de l’amiante », « Je veux vivre à Aulnay sans amiante »… Samedi dernier, une centaine de personne s’était donné rendez-vous devant le site abandonné de l’usine du Comptoir des Minéraux et des Matières Premières (CMMP). Militants anti-amiante, parents d’élèves, anciens salariés de l’usine ou simples riverains, tous ici n’avaient qu’un objectif : attirer l’attention de la population et des autorités d’Aulnay-sous-Bois sur cette usine, dont les ruines sont truffées d’amiante. Bien que jouxtée sur sa droite par un cimetière, elle se situe en pleine zone d’habitation pavillonnaire. Plus délicat encore : une école maternelle et primaire se situe juste sur son flanc gauche !

Selon les organisateurs, cette usine ne contient pas seulement de l’amiante dans ses structures : pendant des décennies, elle en en a même fabriqué, et en grande quantité ! Deux problèmes se poseraient : tout d’abord le problème de l’amiante dans l’air autour du site, même désaffecté, sujet à de lourdes polémiques, et la controverse autour de la procédure de démolition préconisée. Démolition « à la sauvage », avec tous les risques que cela comporte pour les populations alentours, ou démolition sous confinement, limitant les dangers, et bien plus coûteuse.

Au nom des victimes de l’amiante, Henri Boumandil, secrétaire de l’association « Addeva 93 » (Association Départementale Des Victimes de l’Amiante), s’est exprimé avec une certaine émotion : « on a accepté l’installation d’une usine en pleine zone pavillonnaire et, des enfants ont été rattrapés par l’amiante trente, quarante ans après… ». Il s’est insurgé contre l’inaction des autorités : « il est possible de faire quelque chose pour que ça s’arrête ! Il faut que cette usine disparaisse ».

Les parents d’élèves de l’école du Bourg étaient certainement les plus inquiets, d’autant qu’il leur est impossible, en raison de la sectorisation, de changer leurs enfants d’établissement. Deux mères de famille reconnaissaient que la mobilisation n’avait pas été aussi forte que ce qu’elles attendaient. « Il n’y a pas énormément de parents mobilisés. On a l’impression qu’il n’y a pas de prise de conscience du danger potentiel. Pourtant, la maternelle s’étend jusqu’à l’usine. On n’était que vingt, vingt-cinq personnes à la réunion de l’école, alors qu’il y a dix-neuf classes de vingt cinq élèves », racontait Marie-Hélène. « Du fait qu’il n’y ait pas de douleur immédiate, les gens ne mesurent pas la gravité », expliquait Céline.

Devant l’usine, les noms des dizaines de personnes mortes de l’amiante ont été égrenés. L’âge des personnes décédées, la distance qui les séparait des lieux ont été rappelés, dans un rituel propre à susciter l’émotion. Des pancartes rappelant les noms et l’age des victimes ont été déposées sur le grillage. Elles rappelaient la mort d’un proche, d’un collègue ou d’un voisin…« Renée 59 ans, morte d’un mésothelium, elle allait à l’école du Bourg », « Giselle, 72 ans, morte en 2000 d’un mesothelium, à 450 mètres de l’usine… », « Jacques, 62 ans, mort en 2005, il travaillait au cimetière à côté »… « Mohammed, 70 ans… il travaillait au CMMP… ».

Des représentants des pouvoirs publics ont assisté à la cérémonie…pas nécessairement avec la même disposition d’esprit que la majorité des manifestants. Ainsi, le maire d’Aulnay-sous-Bois, est venu avec son adjoint. En tant que représentant de l’autorité publique, il a plaidé contre la « dramatisation » : « Je pense que c’est alarmiste. On a fait trois séries de prélèvements, tous négatifs. Mais si on me demande de refaire des prélèvements, je le referai… quitte à dilapider l’argent public. Selon le tribunal, il n’y a pas de danger immédiat. Dans cette affaire, il y a un côté irrationnel. Je comprends que les gens puissent avoir peur, mais il faut savoir raison garder. Je suis ingénieur hydrogéologue, j’ai une structure cartésienne, un peu carrée. Je ne peux pas déménager une école uniquement sur une peur». Il relativise aussi la portée des déclarations des associations : « je suis d’Aulnay depuis 1970, je suis dans le rayon des 500 mètres… ».

Quel est l’enjeu derrière ces visions contradictoires ? Certainement le financement de la déconstruction du site par les autorités publiques, avant même l’aboutissement des procédures en cours vis-à-vis de l’ancien exploitant (le CMMP). Autant les manifestants ont pour objectif d’obtenir que la déconstruction soit faite dans les règles, par confinement et le plus rapidement possible, autant la commune comme la préfecture sont peu pressées de participer au financement d’une opération estimée à 2 millions d’euros. Elles pensent que c’est au propriétaire, nouveau ou ancien, de financer les travaux de dépollution de l’amiante. Malheureusement, l’un comme l’autre conteste, et refuse d’assumer cette charge…

Devlin Belfort

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