Il se dit « à jamais reconnaissant » envers ceux qui l'ont accueilli pour un séjour enrichissant de cinq mois à New York. Mourad Chalal est coordinateur des centres sociaux à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), un poste stratégique étant donné l'importance de ces quatre structures de médiation implantées dans quatre des quartiers sensibles de la ville.
En 2018, le quadragénaire a décroché une bourse de 15 000 dollars dans le cadre du programme Ful Bright, créé juste après guerre par le département d'Etat américain, très sélectif et dédié aux étrangers sur la base du mérite. « Une expérience qui a « changé (sa) vie », assure-t-il.
Sur la question du soft-power (l'idée d'identifier des dynamiques et des leaders et de les rallier à sa cause), évidemment, l'homme est frileux. « J'ai été bénéficiaire de leur programme : c'est délicat de critiquer. Oui, les Etats-Unis débarquent parfois en mode bootcamp (NDLR : en mode militaire) pour attirer des pépites d'ici ou d'ailleurs. Et alors ? Tant que cela marche en réseau, en partenariat avec les pays concernés, c'est positif, cela crée une émulation. »
Dans un autre article, Le Parisien donne une interprétation quelque peu différente de cette manne de dollars qui s'abat sur nos villes de banlieue, extrait:
Globalement, les diplomates sont réticents à aborder le sujet du soft power dans les banlieues françaises. La faute aux Wikileaks — la fuite de documents confidentiels diplomatiques américains à grande échelle — qui, au moment des émeutes de Clichy-sous-Bois en 2005, révélaient que les USA reprochaient à la France de « ne pas considérer ses compatriotes à la peau sombre et musulmans comme des citoyens à part entière ». Une critique acerbe du gouvernement français qui met mal à l'aise les autorités américaines....
Eric Schirmacher, de l'association Villes des musiques du monde, basée à Aubervilliers, a pu emmener 30 ados d'Aulnay et La Courneuve peaufiner leur jazz à la Nouvelle Orléans (Louisiane), grâce à l'ambassade et un don de 25 000 dollars. « Dès qu'on leur a exposé le projet, ils ont suivi! Le fait que cela ait un impact sur des quartiers populaires a été un critère essentiel pour eux », poursuit-il. Un nouveau voyage au pays du jazz est prévu à la fin 2021....
Au-delà de l'aspect culturel, Stéphane Gatignon, maire de Sevran entre 2001 et 2018, le confirme : l'intérêt des Américains n'est pas uniquement philanthrope. « Ils ont compris que beaucoup de musulmans vivent dans nos banlieues, que cette population est parfois délaissée par l'Etat Français, et qu'une forme d'islam radical a pu s'y développer. Alors, ils essayent de comprendre… De surveiller, aussi, d'une certaine manière, d'avoir des remontées d'informations. Sans doute que la CIA (NDLR : l'agence de renseignements américains) n'est pas loin derrière. Indirectement, elle suit ce que l'ambassade fait dans nos quartiers… »
Extrait de deux articles du Parisien du 30 décembre 2018