Justice, Seine-Saint-Denis

Plongée au cœur du tribunal de Bobigny

8 mai, 2021 à 9:46 | Posté par

La vie quotidienne des juges d'instruction

Dans le bureau de l’un des quatorze juges d’instruction de Bobigny, les dossiers s’entassent. Ceux-ci concernent une seule affaire, bientôt jugée. LP/Arnaud Dumontier

Clara Castello a un Code pénal posé sur le rebord de la fenêtre et un casque de télé­opé­rateur sur la tête. À l’autre bout du fil, les policiers lui racontent la bêtise et la violence des hommes. (...)

Ses collègues prennent en charge les meurtres, les escroqueries, les faits impliquant des mineurs ou des stupéfiants. Clara Castello a droit aux viols et aux homicides conjugaux ainsi qu’à la délinquance du quotidien.(...)

Pour Clara Castello, ce lundi de la fin mars est une journée terriblement ordinaire. Un mari qui bat sa femme devant enfants et voisins. Une pharmacie dans laquelle un client, après avoir été houspillé par le vigile, revient armé d’un couteau. Un illuminé qui erre la nuit dans le jardin d’un particulier, guidé, dira-t-il, par l’esprit de sa mère décédée…(...)

Clara Castello ne s’accorde qu’une poignée de minutes pour décider de « l’orientation pénale » de chaque dossier. Cette femme qui a craché au visage d’une voisine pour un saladier oublié ? Ce sera un rappel à la loi agrémenté d’un stage de citoyenneté. Ces deux collègues qui se sont battus à coups de pelles ? Ils devront s’expliquer devant un médiateur. Et cet homme qui, en six mois, a contacté 7 000 fois son ex-compagne, la menaçant par SMS : « Je vais te brûler toi et ta famille » ? Procès !(...)

Chargée des couples en procédure de divorce ou déjà séparés, Sylvie Le Cabec, 64 ans, voit souvent, dans ce département, des femmes assujetties à leur mari, sans moyen de paiement ni téléphone, sans amis ni travail. Et constate aussi les répercussions de ces conflits sur les enfants, qu’elle peut décider d’entendre : « Je leur demande ce qui changerait leur vie. Certains me répondent : Que papa et maman arrêtent de s’insulter. Je le répète aux parents, en espérant que ça percute. »(...)

Au rez-de-chaussée, autre ambiance. Chaque mardi, par l’intermédiaire d’un juge de l’exécution, banques et syndics de copropriété vendent aux enchères publiques les biens préalablement saisis de leurs mauvais payeurs. Les acheteurs potentiels ont pu visiter les logements quelques jours auparavant. Si le propriétaire refuse d’ouvrir, la loi autorise le recours aux forces de l’ordre.(...)

C’est aux juges d’instruction qu’échoient viols, vols à main armée, meurtres, assassinats… Et le plus sombre de l’âme humaine, notamment de sordides affaires de pédophilie. (...) La quadragénaire, en charge d’une centaine d’affaires, est ainsi confrontée aux bébés secoués ou aux règlements de comptes entre cités, « parce que lors d’une expédition punitive dans un quartier, un jeune s’est enfui moins vite que les autres ».(...)

La juge d’instruction ne décide jamais des peines. Son rôle se borne à conduire les enquêtes : auditions, demandes d’expertises… 

Extraits d'un article du Parisien

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